Hyperendémie à Dieppe
ma fille Gwendoline 4 ans est décédée en Janvier 2003
"Souvenez-vous, de 2003 à 2012, la Normandie - et plus particulièrement le bassin dieppois - connaît une situation d’épidémie d’infection invasive à #méningocoque (IIM) due à la dissémination d’une souche de groupe B particulièrement virulente dénommée B:14* (B 14 P 1 7 16)
Désormais contrôlée grâce à une #vaccination spécifique cette #épidémie avait suscité un grand émoi dans la population, chacun s’interrogeant sur les origines du phénomène.
Une équipe de Rouen vient d'élucider le mystère en mettant à jour un mécanisme bactérien d’adaptation et de diffusion qui transforme le portage sain d'une bactérie en une infection particulièrement contagieuse ...."
source : l'actu des CHU
A mon petit ange Gwendoline
Méningite à méningocoque « B:14 » : le mystère de l’épidémie normande
... De longue date, il est établi que le méningocoque se comporte comme « Docteur Jekyll et Mister Hyde ». Il représente l’archétype de la bactérie hôte d'un organe pouvant devenir ultra-virulente : portée de façon parfaitement saine dans le pharynx de 10 % de la population générale, la B:14 est parfois responsable d’infections invasives, quasi mortelles en l’absence de traitement.
Les facteurs bactériens responsables de cette double vie entre portage asymptomatique et maladie dévastatrice restent mal connus en dehors du rôle bien établi de la capsule.
En effet, la plupart des méningocoques en situation de portage en sont dépourvus, ceci suffisant à leur virulence.
Les méthodes les plus récentes d’analyse des gènes bactériens (génomique comparative fonctionnelle) viennent d’apporter des éléments explicatifs.
Dans le nouveau numéro de VIRULENCE** l’équipe d’infectiologie-microbiologie du CHU et de l’UFR Santé de Rouen et le Centre National Référence des méningocoques de l’Institut Pasteur démontrent le mécanisme par lequel « B:14 » s’était adapté à cette double vie.
Lors de l’épidémie normande, un souchier unique en France et rare dans le monde avait été constitué. Il associait pour un même clone hyper-invasif (ici « B:14 ») des isolats d’infections graves (ce qui est banal) mais aussi d’autres provenant de portage sain (certains non capsulés, mais d’autres capsulés, ce qui est là très rare).
Impossibles à distinguer par les techniques conventionnelles de typage, ces isolats ont d’abord été soumis à une analyse du génome complet, dans un travail en collaboration avec l’équipe INSERM de génétique humaine UMR 1079 de l’Université de Rouen et le laboratoire en recherche génomique de l’Hôpital Universitaire de Genève.
Cette démarche a permis d’identifier différents gènes polymorphes distinguant nettement les isolats invasifs de ceux de portage, en particulier pour hmbR, un gène impliqué dans l’acquisition du fer à partir de l’hémoglobine. Dans ce gène une séquence d’ADN agit comme un interrupteur pour contrôler son expression entre allumé/éteint (OFF/ON). L’intercepteur s’est avéré allumé dans les souches des malades et éteint dans les souches capsulées des porteurs sains. Le changement expérimental de l’interrupteur de « éteint » à « allumé » a permis aux souches des porteurs de retrouver la virulence.
Lorsque le gène hmbR est allumé, la bactérie peut alors récupérer le fer de l’hémoglobine, ce qui est important pour sa croissance et sa capacité d’invasion
En effet, le fer est un facteur important pour la nutrition et le développement de nombreuses bactéries, et ceci a déjà été décrit chez le méningocoque lorsque les bactéries sont en culture sur des boîtes de Pétri.
L’originalité du présent travail est d’avoir analysé précisément le rôle de ce système pendant l’infection et de montrer le rôle de la variation de phase du gène hmbR (allumé/éteint) au sein d’un même clone épidémique.
Ainsi la mise en « Off » permet à une souche hyper-virulente de s’adapter au portage, condition sine qua non de transmission d’individu en individu (l’invasion étant une forme d’impasse pour la bactérie, le sujet infecté décédant).
En d’autres termes Docteur Jekyll a fortement besoin du fer (comme Popeye) pour basculer du côté obscur de Mister Hyde.
Aucun facteur humain ou environnemental particulier n’a été identifié comme ayant pu favoriser « le phénomène dieppois ».
Le présent travail confirme la virulence du clone en cause et décrit un mécanisme bactérien d’adaptation et de diffusion pouvant expliquer à lui seul l’épidémie.
Les chercheurs remercient les 3 522 volontaires de la zone de Dieppe ayant participé en 2008 à l’étude de portage aboutissant in fine à la présente découverte ainsi qu’à la Région Normandie ayant financé une bourse de trois années pour le doctorat en sciences consacré à cette recherche.
*B:14:P1.7,16/ST32 - formule selon sérogroupe ; sérotype ; séro-sous-type ; séquence-type
**revue anglo-saxonne dévolue à l’étude du pouvoir pathogène des micro organismes
Catégorie :
CHU Rouen, Recherche -Etude, Maladies infectieuses et tropicales, Newsletter 942 -
12/06/2018
Epidémie meurtière de méningite pendant 10 ans en Seine-MartimeLa violence de l'épidémie de méningite avait fait 20 morts entre 2003 et 2013 Elle vient d'être expliquée par les caractéristiques particulières du méningocoque « B:14 »
Des années après, des spécialistes ont réussi à expliquer l’épidémie de méningite qui avait fait 20 morts en Normandie entre 2003 et 2013. En tout, 165 patients avaient contracté la maladie due au méningocoque « B : 14 ». Et dans la région de Dieppe ( Seine-Maritime), les cas étaient douze fois plus nombreux qu’habituellement.
Une étude publiée le 15 mai dans la revue scientifique Virulence explique l’évolution qui a permis aux effets de la bactérie de devenir si violents. La bactérie se met en sommeil.
« La bactérie est capable de s’éteindre pour contaminer d’autres sujets. Pour ne pas se faire hara-kiri en tuant son porteur, elle est capable de se mettre en sommeil et contaminer une autre personne, puis se réveiller. Dans un gène de cette bactérie, une séquence d’ADN agit comme un interrupteur pour contrôler son expression entre allumé et éteint »,
résume Muhamed-Kheir Taha, un des auteurs de l’étude.
Les travaux des chercheurs français présentés à la presse ce vendredi 8 juin à Rouen ont également montré que c’est du fer présent dans le sang que le méningocoque avait tiré sa virulence.
Grande capacité d’adaptation
Pour arriver à leurs conclusions, les scientifiques ont effectué des comparaisons génétiques entre les souches saines et les souches « B : 14 » grâce à la participation de 3.522 volontaires en 2008, rapporte le site 76-Actu.
L’étude a aussi mis en avant les grandes capacités d’adaptation et de contamination de la bactérie, qui expliquent l’ampleur de l’épidémie.
D’autres questions restent néanmoins en suspens.
« On a démontré le pourquoi du comportement épidémique, mais je ne saurai pas vous dire pourquoi tout a commencé à Dieppe. (…) nAucun facteur humain ou environnemental particulier n’a été identifié », explique Muhamed-Kheir Taha.
Soure : 20 Minutes